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La péréquation mise en perspective.

24/05/2011

Un collègue fort apprécié m’a questionné aujourd’hui sur la fameuse péréquation,  l’impact sur les revenus du Québec et l’éventualité d’un Québec souverain. Étant à la recherche d’un texte plus neutre, moins engagé que l’on peut retrouver sur Vigile.net (et ici je ne veux rien retirer à la valeur des textes publiés sur le sujet, mais ceux-ci s’adressent davantage à un lectorat acquis) je suis tombé sur ce texte:

6 avril 2010

Péréquation : quelques mythes dégonflés

Michel C.  Auger

Les documents déposés en même temps qu’un budget ne font pas toujours les manchettes, surtout quand il y en a pour plus d’un millier de pages. Mais c’est un des moyens dont dispose un gouvernement pour envoyer des messages. La semaine dernière, Québec voulait envoyer des messages à propos de la péréquation. 

On a beaucoup entendu, ces derniers mois — en provenance de l’Alberta, surtout, mais aussi de la droite canadienne en général — la théorie voulant que le Québec doive s’abstenir de critiquer l’exploitation des sables bitumineux, parce que ceux-ci permettent, par l’entremise de la péréquation, au Québec de maintenir ses généreux programmes sociaux. 

La péréquation par habitant 

Le chapitre E du plan budgétaire du Québec dégonfle ce mythe point par point. D’abord, en rappelant tout simplement que la péréquation n’est pas un programme de transfert de richesses d’une province à l’autre, c’est un programme payé exclusivement par le gouvernement fédéral et auquel tous les contribuables canadiens contribuent. 

Les résidents du Québec financent donc leur part de la péréquation, comme tous les autres Canadiens.  

Si le Québec est le plus grand bénéficiaire de la péréquation en chiffres bruts, soit 8,6 milliards de dollars en 2010-2011, c’est surtout parce qu’il compte 7,9 millions d’habitants. Parce qu’il est aussi — après l’Ontario qui reçoit une contribution plutôt symbolique de péréquation — celui qui en reçoit le moins par habitant, soit 1111 $, contre plus du double pour des provinces comme l’Île-du-Prince-Édouard ou le Nouveau-Brunswick. 

Voilà pour l’importance relative de la péréquation dans les finances publiques du Québec. Mais l’argument le plus intéressant du ministère des Finances est que le Québec finance lui-même ses programmes sociaux novateurs, et que la péréquation a, somme toute, assez peu à voir là-dedans. 

Les programmes sociaux du Québec 

La péréquation vise à permettre à toutes les provinces canadiennes de disposer d’un niveau minimal pour financer des services publics de qualité comparable. Elle existe pour permettre aux provinces moins nanties d’offrir ce niveau minimal sans devoir imposer aux citoyens un fardeau fiscal plus élevé que la moyenne canadienne.  

Huit milliards, ce n’est certainement pas négligeable dans le budget du Québec, mais ce n’est pas ce qui lui permet de financer de nouveaux programmes sociaux.  

On le sait, le Québec taxe plus ses citoyens que la moyenne nationale. Et cet excédent sert précisément à financer des programmes comme les garderies à 7 $ ou l’assurance médicaments. 

D’autres provinces ont fait d’autres choix. L’Alberta, par exemple, n’a pas de taxe de vente provinciale et elle a des impôts sur le revenu des particuliers moins élevés. Si elle appliquait une fiscalité à la québécoise, elle aurait 15 milliards de plus dans ses coffres. Mais elle a fait un autre choix politique. 

De son côté, le Québec a fait le choix d’offrir plus de services publics, mais c’est lui qui les finance avec des impôts plus élevés. Il aurait pu faire le choix inverse et avoir moins de programmes sociaux et une fiscalité moins lourde pour ses citoyens. Mais, ce qui est important de noter, c’est que, dans les deux cas, il recevrait exactement le même montant en péréquation.  

Le niveau de services publics au Québec n’a donc rien à voir avec la péréquation. C’est une question de choix politique, comme l’est celui de l’Alberta de se priver des revenus d’une taxe de vente provinciale. Et c’est la nature même d’une fédération que de ne pas avoir des impôts ou des services identiques dans chacune des provinces. 

Sur la question précise des sables bitumineux, les documents budgétaires notent que depuis l’imposition d’un plafond des paiements de péréquation en 2008, il n’y a plus de lien entre les revenus que l’Alberta tire de son pétrole et les paiements que reçoit le Québec. 

Par contre, il y a un lien très étroit et facilement démontrable entre les prix du pétrole et la hausse du dollar canadien, la courbe de variation de ces deux éléments étant pratiquement identique depuis 2000.  

Or, la hausse du dollar canadien (liée à la hausse des prix du pétrole) nuit aux provinces exportatrices, comme le Québec. Il y a donc une question de simple justice que d’avoir un programme comme la péréquation qui protège certaines régions du pays contre l’effet négatif qu’elles peuvent subir à cause de conditions économiques sur lesquelles elles n’ont aucun contrôle. 

Le document contient encore bien des informations pertinentes, entre autres concernant le traitement inéquitable fait aux ressources hydrauliques du Québec dans le calcul de la péréquation. 

Mais, surtout, il constitue une intéressante contribution au débat, au moment où on entend de plus en plus souvent cet argument facile qui veut que ce soit les sables bitumineux de l’Alberta qui financent les garderies du Québec. La situation est pas mal plus compliquée que cela et se prête assez mal aux raccourcis simplistes.

http://www.radio-canada.ca/nouvelles/carnets/2010/04/06/128553.shtml?auteur=2094

Et voici le fonctionnement de la péréquation tiré du site du Ministère des Finances du Canada: ( http://www.fin.gc.ca/fedprov/eqp-fra.asp )

  • Les droits à péréquation sont établis en mesurant la capacité des provinces de générer des revenus, ce qu’on appelle la « capacité fiscale ».
  • Avant tout rajustement, le droit à péréquation par habitant d’une province est égal au montant qui manque à sa capacité fiscale pour atteindre la capacité fiscale moyenne de l’ensemble des provinces, ce qu’on appelle la « norme de 10 provinces ».
  • Les provinces reçoivent le plus élevé des deux montants suivants : le montant qu’elles recevraient en excluant la totalité des revenus des ressources naturelles ou le montant qu’elles recevraient en excluant 50 % des revenus des ressources naturelles.
  • La péréquation est rajustée de manière à assurer l’équité entre les provinces tout en faisant en sorte que les provinces bénéficiaires puissent tirer de leurs ressources un avantage fiscal net qui équivaut à la moitié des revenus des ressources naturelles par habitant des provinces bénéficiaires.
  • La péréquation est également rajustée de façon à ce que les paiements pour l’ensemble du programme augmentent en fonction de l’économie. Cette augmentation est fondée sur la moyenne mobile de croissance du produit intérieur brut (PIB) sur trois ans. Cela favorise la stabilité et la prévisibilité tout en permettant de tenir compte de la croissance économique et de protéger les provinces contre une réduction globale de la péréquation.
  • En outre, le programme fait en sorte que la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve-et-Labrador continuent de bénéficier des avantages qu’offrent les Accords atlantiques. En 2007, les deux provinces ont eu le choix de continuer de fonctionner selon l’ancien système de péréquation ou d’adhérer de façon permanente au nouveau programme, n’importe quand avant l’expiration des ententes sur les ressources extracôtières. Ayant choisi le nouveau programme, la Nouvelle-Écosse est assurée de bénéficier d’un traitement au moins aussi favorable, à titre cumulatif, qu’en vertu de la formule appliquée lorsque l’Accord a été signé. Terre-Neuve-et-Labrador, qui continue de fonctionner selon l’ancien système, sera assurée de la même chose lorsqu’elle adhérera au nouveau système.
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